Les oubliés

J’viens de croiser un couple de personnes d’un certain âge dont le petit bonheur de la semaine était d’aller le dimanche après-midi au bal ou à un « thé dansant ». Rencontrer des amis, parler, rire, casser la monotonie de la vie à la campagne….Un peu la même chose qu’au café dans l’temps….car, voyez-vous, y’a plus de café chez ces gens là… Les cafés ont fermé les uns après les autres …
Et depuis l’épidémie y’a plus de bals non plus.
Plus de café, plus de bals…
De toutes façons, voyez-vous Messieurs, ces gens-là auraient, désormais, du mal à se rendre au bal, vu leur maigre retraite d’agriculteur et vu le prix des carburants.
Et comme ici, mes bons Messieurs, on n’a que la voiture…
S’ils dépriment ou tombent malade, quasiment plus de médecins non plus pour les soigner et les accompagner, même dans les bourgs d’une certaine importance (comme Allanche par exemple)…..
En cette période, pour savoir si on a la covid, ben, faut se débrouiller pour faire plusieurs dizaines de kms afin de se faire tester et revenir se confiner chez soi.
Avant, les femmes se croisaient à l’école du village en allant chercher les gosses. Les villages n’ont plus d’école. Il y a trop peu d’enfants. Question gros sous, vous comprenez.
Comment voulez-vous qu’il y ait des enfants, Messieurs aux épaules étroites, qui cogitez notre avenir depuis vos bureaux?
On a inventé le « ramassage scolaire » pour rentabiliser l’affaire. On transporte les quelques gamins des campagnes encore endormis dès le petit matin à l’école de la ville dans des classes parfois surchargées.
Je sais je suis simplet, mais j’me demande pourquoi on ne transporterait pas plutôt les gosses de la ville à la campagne? Ils en seraient enrichis de connaissances nouvelles, cela maintiendrait en vie des villages et les aiderait peut-être à redémarrer, cela tout en désengorgeant certaines écoles de ville.
En outre, les gosses oublieraient un peu leurs smartphones et toutes les aliénations que ceux-ci leur procurent.
Pas sûr, me direz-vous! Ah si sûr, car voyez-vous, Messieurs aux épaules étroites si intelligents, chez nous « ça passe pas » comme on dit. Donc un appel téléphonique peut-être, mais le surf sur la toile niet.
J’arrête mais j’suis en colère. Parce que j’entends parler de progrès, d’avenir radieux, de résultats évidents qui auraient été obtenus, par des gens tous plus contents d’eux les uns que les autres.
Vous savez, ces gens qui travaillent jours et nuits pour nous, notre bonheur et pour des salaires modérés, sur des dossiers et des problèmes extrêmement complexes (qu’on appelle dans le peuple des « bâtons merdeux »). ……
Mais voyez-vous, leur idéal, leur vocation, leur abnégation sont tels qu’ils en redemandent.
Je suis en colère parce que je vois bien que la situation s’aggrave et que la « centralisation » s’accroit toujours plus, que les lieux de décision s’éloignent toujours plus de nous, y compris par des réformes présentées comme étant des progrès (comme l’affaire de la taxe d’habitation par exemple).
Je suis en colère quand je regarde le nom de nos élus qui ont porté la responsabilité de traiter ce dossier et qui continuent leur carrière sereinement en étant responsables de rien, devant personne.
Tiens, regardons depuis 2010:
Bruno Lemaire, Cécile Duflot, Sylvia Pinel, Jean-Michel Baylet, Richard Ferrand, Julien de Normandie, et Jacqueline Gourault qui du fait de ses grandes compétences a été récemment promue magistrate au Conseil Constitutionnel.
Oui, je suis en colère mais la caravane passe et passera encore….

Clément RODIER

Article de Marie Claire TIXIER sur un petit gars de chez nous
Frère Clément RODIER, du canton de Saint-Germain-L’herm
L’Algérie et … la clémentine …
Quand on déguste ce petit fruit sans pépins venant d’Espagne, d’Israël ou de Californie, on est bien loin de penser à ce petit Frère Marie-Clément (1) qui inventa la clémentine dans un coin d’Algérie (française) peu connu, appelé Miserghin (*).
(*) Misserghin (parfois dite Miserghin ou Mizerghin) est une commune algérienne de la wilaya d’Oran. Dès 1843, des familles françaises arrivent à Misserghin. Aucune installation n’est prévue pour les recevoir : en conséquence, elles logent et cohabitent dans un dépôt du vieux village. Un état dressé le 1er novembre 1843 par le commandant de la place permet de se souvenir de ces familles sans lesquelles il n’y aurait jamais eu de village.
Frère Marie-Clément est né le 25 mai 1839 dans un coin reculé du Puy-de-Dôme appelé Malveille, un hameau de la commune de Chambon-sur-Dolore, dans ce coin du Livradois du canton de Saint-Germain-L’herm. Un Vital à Malveille, quelle ironie ! Ce n’est point là qu’il pouvait espérer grand avenir. Mais l’avenir qu’il décida de poursuivre ne fut point grand, aux yeux de beaucoup.
Il s’appelle Vital RODIER. Il est le second fils de Jean RODIER, cultivateur et scieur de long, & Jacqueline COMMUNAL, et de fait déjà l’aîné, puisque son frère Benoît, né le 26 mai 1837, est décédé au bout d’un an, le 21 juillet 1838. 2 autres fils ont suivi, Guillaume en 1842 et Benoît en 1844.
Malvieille est alors un de ces gros villages tel qu’il en existe un peu partout ; un trop plein de main-d’œuvre ; il faut bien émigrer pour vivre ! La maison de ses parents est juste en face de celles des autres RODIER de Malvieille : de dom Macaire RODIER, alors chartreux à Valbonne ; de Guillaume RODIER, frère de ce dernier, dont les enfants partent les uns après les autres vers l’Algérie ; de la maison aussi des ANGLADE … [des unes et des autres, il ne reste en 2010 que quelques tas de pierres].
En 1854, à 15 ans, Vital RODIER part dans le Gard, à la Chartreuse de Valbonne, où son cousin dom Macaire (Claude RODIER) est vicaire ; il y fait 2 ans d’études, tout en s’essayant en parallèle au régime rigoureux de la vie des moines chartreux. Sa santé fragile s’accommode assez mal aux exigences du Consuetudines Cartusiae, qui régit la vie austère (2) de cet Ordre.
En 1856, lassé des hivers locaux, Vital décide de rejoindre en Algérie plusieurs de ses cousins, dont André RODIER, à la congrégation de Notre-Dame de l’Annonciation, à Messerghin près d’Oran, dirigé par le père Abram. Cela fait 17 ans que la Congrégation est installée là dans un vaste domaine.
Vital RODIER arrive le 1er novembre à Miserghin, à la Toussaint. Il y retrouve ses cousins Jean, André-Claude, Antoine et Jean-Marie RODIER (devenus Frères Joseph, Marie, Isaac et Stanislas) et tous les autres voisins du Livradois.
Cet institut de Frères se préoccupe, comme beaucoup d’autres alors, des trop nombreux orphelins. Le Père Abram a 38 ans et, en ces années qui suivent la conquête de l’Algérie, a transporté ses orphelins et ses petits frères de « l’Annonciation » sur une terre ouverte à toutes sortes d’initiatives, ayant, après des démarches tenaces, obtenu en 1849 une concession de 30 ha à Miserghin, village de colonisation à 21 km au S-O d’Oran. 2 ans plus tard, on lui a accordé en plus les 12 ha d’une pépinière étatique. La ténacité du Père Abram, jointe à l’immense bonne volonté de ses petits frères, transforme le domaine en une grande exploitation agricole, doublée d’ateliers où se forment les orphelins venus de France et d’Algérie.
C’est à cette pépinière que travaille notamment le Frère Marie-Clément RODIER.

« On peut dire que rien n’a été planté sans lui dans les 20 ha de la pépinière et les 35 ha du vignoble. C’est lui qui a introduit dans le pays plusieurs centaines d’espèces d’arbres forestiers, fruitiers ou d’ornement, sans compter une merveilleuse collection de rosiers comprenant près de 600 variétés des plus rares … Il obtint même et développa plusieurs variétés de plantes et de fruits, entre autres une espèce de mandarine, qui fait l’admiration des connaisseurs, et que les orphelins de l’établissement ont baptisée du nom de Clémentine. » (3)

L’origine ou l’hérédité de ce fruit désormais populaire est assez mystérieuse. Les sociétés savantes et la tradition se contredisent ou se complètent. Les botanistes la découvrent sur le tard, alors que le Frère Marie-Clément en fait déjà exploitation.
Son invention reste floue. Elle remonterait à une époque entre 1892 et 1900. La pierre tombale du Frère la situe en 1894, mais des auteurs, tous sérieux, sont loin d’être d’accord sur cette date.
La modalité est non moins mystérieuse (4). La tradition fournit 2 explications.

« Il y avait sur le terrain, au bord de l’oued Miserghin, un arbre non cultivé qui avait poussé là parmi les épines ; ce n’était pas un mandarinier, ni un oranger ; ses fruits plus rouges que les mandarines étaient d’une saveur délicieuse et n’avaient pas de pépins ; c’est ce que devait apprendre au Frère Clément un jeune arabe qui en avait dégusté ; intéressé par ces fruits, l’arboriculteur prit sur lui la décision de faire des greffes avec des greffons de l’arbre miraculeux. L’opération réussit ; on multiplia les greffes et au nouvel arbre on donna le nom de clémentinier.« 

Une autre version est donnée par le fils d’un employé qui vivait à la pépinière au temps du Frère Clément et dit que celui-ci aurait suivi le travail d’une abeille en train de butiner :

« L’abeille passe d’un bigaradier sur un mandarinier ; que peut-il sortir d’un tel mélange de pollen ? Le Frère attache un ruban rouge à la fleur du mandarinier et surveille la production ; il prélève le fruit à maturité, fait un semis et obtient la clémentine … »

Peu importe, en fait ! La curiosité historique est unanime pour attribuer l’invention de la clémentine à Vital RODIER, devenu Frère Marie-Clément en entrant chez les Frères de l’Annonciation.
L’inventeur de la clémentine décède le 20 novembre 1904 (5), à l’âge de 65 ans ; il est alors déclaré comme « pépiniériste, demeurant à Miserghin, célibataire ». Cela fait 48 ans qu’il est arrivé.
Un an après la mort de Vital RODIER dit Frère Marie-Clément, l’orphelinat de Misserghin connaît un sort singulier : alors que les lois de séparation de 1905 ont fait fermer la vingtaine de collèges spiritains en France, seul Misserghin a pu rester ouvert, en ce département alors français.

Lors du départ des religieux, après l’indépendance algérienne et la nationalisation de l’orphelinat, les tombes de tous les spiritains morts à Misserghin sont nivelées et recouvertes d’un gazon sous lequel disparaissent leurs noms et avec eux, l’évocation de leur présence et de leur dévouement. Les restes du Frère Marie-Clément sont placés dans l’ossuaire du couvent.

  • Frère Clément s’est aussi intéressé durant 40 ans à relever la température moyenne à Miserghin, la pluviométrie, à faire diverses autres activités scientifiques. Mais c’est la découverte de la clémentine qui l’a rendu célèbre, bien que peu de personnes connaissent le Frère RODIER.
D’après « Les Frères Courage, Mémoire Spiritaine », Etudes et Documents (1994)
(1Il est le seul Frère spiritain à se trouver dans le Larousse et, pardonnez du peu, c’est dans les noms communs. « Clémentine : n.f. (du nom du F. Clément qui obtint le fruit en 1902). Mandarine d’une variété à peau fine, fruit du clémentinier. » (Petit Larousse 1998). Pour le même fruit hybride du bigaradier et du mandarinier, le Petit Robert renvoie à un « Père Clément ».
(2)« Sa santé est trop fragile pour supporter les exigences de la vie des chartreux ». Père Roger Tabard, archiviste adjoint.
(3Il marque ses essais dans des cahiers (qu’on a perdus), notant le lieu, la date, les résultats des diverses expériences. op cit.
(4D’après le Dr Trabut, de la « Sté d’horticulture », qui visite souvent les nombreux travaux du Frère, celui-ci aurait créé par hasard un hybride de mandarinier et de bigaradier à feuilles de saules ou granito. Ceci se passe en 1900 et on le nomme d’abord « mandarinette ». Lorsque les botanistes ont pris conscience de l’intérêt de ce nouvel agrume, la parcelle d’origine a été arrachée. Impossible de connaitre les plans d’origine. op cit.
(5) Le Frère RODIER, mort depuis 1904, a obtenu pour sa découverte la médaille d’Or grand module de la Sté d’Agriculture d’Algérie, qui a baptisé en son honneur ce fruit merveilleux de la Mitidja, la « clémentine », 20 ans après sa mort. op cit.
En 1962, l’accession à l’indépendance de l’Algérie et le départ des Français sonnent le glas de la production d’agrumes du pays : de nombreux « pieds-noirs » spécialisés dans la clémentine délocalisent leur savoir-faire en Corse.
En 2002 les chercheurs démontrent que ce fruit n’a pas de lien de parenté avec la bigarade mais avec l’orange douce, au contraire de ce que pensait le Père Clément.

Débâcle temporaire

La température s’élève, la neige fond.
Cependant, en altitude, il en reste encore pas mal.
A titre d’exemple, ces photos prises à seulement 1150 mètres cet après-midi, autour de la ferme « du Girondin », belle ferme située à proximité de « La Cabane », restaurant que je vous recommande si vous venez cet été et si…   🙂