Vaccin AstraZeneca

L’Allemagne ne vaccinera plus les personnes âgées en priorité avec le vaccin AstraZeneca

Le gouvernement allemand veut renoncer à donner la priorité aux personnes de plus de 65 ans dans l’accès au vaccin anti-Covid d’AstraZeneca, suivant l’avis de ses experts qui doutent de son efficacité pour cette classe d’âge, a annoncé le ministre de la Santé samedi.

« Nous allons maintenant devoir revoir l’ordre de vaccination », en raison « des limitations d’âge du vaccin AstraZeneca » a affirmé Jens Spahn, lors d’une discussion avec des personnels soignants. Après un premier avis jeudi, l’autorité vaccinale allemande a réitéré vendredi sa recommandation de ne pas autoriser le vaccin d’AstraZeneca pour les personnes âgées de 65 ans et plus.

Les jeunes et les soignants deviennent prioritaires

Les experts estiment qu’il « n’y a pas assez de données pour se prononcer sur l’efficacité » du vaccin sur les personnes âgées. Ils ont pris le contre-pied de l’Agence européenne des médicaments (EMA), qui a approuvé vendredi l’utilisation dans l’Union européenne pour les plus de 18 ans, sans limite d’âge.

Le ministre Jens Spahn a assuré vouloir « appliquer » la décision des experts allemands. Le vaccin du laboratoire britannique pourrait servir en priorité à immuniser les personnes plus jeunes, et notamment les « personnels soignants », a-t-il ajouté.

L’autorisation officielle des autorités allemandes sera dévoilée en début de semaine prochaine au plus tard.

Autorisation imminente

Le vaccin développé par AstraZeneca et l’université d’Oxford est le troisième à obtenir le feu vert de l’EMA, après ceux de Pfizer-BioNTech le 21 décembre et de Moderna le 6 janvier.

Cette autorisation arrive en pleine polémique sur des retards de livraison du laboratoire anglais en Europe. La chancelière allemande Angela Merkel a convoqué pour lundi une réunion au sommet des autorités allemandes et des fabricants sur le sujet.

Malgré les retards, Jens Spahn a affirmé samedi s’attendre à recevoir « 5 millions de doses supplémentaires d’ici le 22 février », en comptant l’ensemble des vaccins.

Selon l’institut de veille sanitaire Robert Koch, 2,2 % de la population allemande avait reçu vendredi au moins une dose de vaccin, soit 1.855.457 personnes.

Prestations sociales

Le montant des prestations sociales en France est de 787 milliards d’euros par an.
Officiellement, il y aurait 73 700 bénéficiaires de ces prestations.
La Cour des Comptes dit même, plus de 75 000.
Le montant de la fraude avoisinerait la dizaine de milliards d’euros. selon le juge Charles Pratts qui a l’oreille de la commission d’enquête sur la Fraude sociale, mandatée par le gouvernement .
Elle ne serait que de l’ordre de 100 millions d’euros selon le sénateur LREM du Pas-de-Calais Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des Affaires sociales du Sénat.
Il faudrait peut-être mandater les experts du Cabinet Mc Kinsey pour étudier la question? 😞

Quel qu’en soit le prix

Pour qui est admiratif sur la façon dont a été organisé le plan de vaccination en France, sachez qui vous devez remercier, le cabinet McKinsey.
Selon France Culture « Mac Kinsey est une grande entreprise de conseil, l’une des plus grandes au monde, qui conseille 147 des 200 plus grandes entreprises à l’international. Par ailleurs, elle est impliquée dans différents scandales dont celui des opioïdes aux Etats-Unis. Et McKinsey conseille aussi le gouvernement français.
Si l’on en croit le Canard Enchainé, McKinsey aurait donc fait ce plan de vaccination, ce qui est bien réjouissant puisque d’ordinaire, l’on pense dans notre pays que nous avons suffisamment d’énarques et de hauts fonctionnaires pour ne pas avoir en plus à payer des consultants extérieurs pour faire le travail de l’Etat. Car le consultant, c’est bien connu, demande à être payé pour vous donner l’heure en regardant votre montre. Il est aujourd’hui l’incarnation du « bullshit job » cher au regretté David Graeber.
Le terme de « bullshit job » est polysémique, puisqu’il désigne à la fois des jobs de faible qualité, mais aussi et surtout des jobs pipeau, où l’on rétribue grassement des qualités largement surévaluées. Je vous laisse vous-même deviner à quelle catégorie appartiennent les jobs de consultants, tels qu’ils sont proposés chez McKinsey. Reste que la distinction entre haute fonction publique et cabinets de conseils est en réalité de plus en plus factice, et ce dans tous les gouvernements du monde. »

Pas rassurant du tout

Cette analyse de différents articles scientifiques très récents, effectuée par Marc Gozlan dans Réalités biomédicales, confirme hélas mes craintes antérieures.

 

Que se passe-t-il à Manaus dans l’État d’Amazonas ?

En octobre 2020, cet état du nord-ouest du Brésil avait été durement touché par l’épidémie de Covid-19. Publiée en octobre 2020 dans la revue Science, une étude conduite auprès des donneurs de sang indiquait que plus des trois quarts (76 %) des habitants de la plus grande ville de la région amazonienne possédaient des anticorps contre le SARS-CoV-2. Le taux de prévalence des anticorps (ou séroprévalence) y était donc particulièrement élevé à ce moment-là. Par ailleurs, le nombre de personnes contaminées à partir des sujets infectés étant important, avec un taux de reproduction effectif (R) égal à 3, le taux d’immunité collective à Manaus devait théoriquement atteindre les 67 %.

Dans un tel contexte, on peut donc s’étonner de l’augmentation brutale du nombre des hospitalisations au cours du mois du janvier 2021. Dans une population aussi largement immunisée par l’infection naturelle, les anticorps ne protégeraient-ils pas d’une diffusion massive du virus ?

Des chercheurs appartenant à diverses institutions brésiliennes (dont l’université de São Paulo) et organismes de recherche britanniques (université d’Oxford, London School of Hygiene and Tropical Medicine) et américains (École de santé publique de l’Université Harvard, université de San Francisco) ont réfléchi à cette question et livrent leurs réflexions dans une correspondance publiée en ligne le 27 janvier 2021 dans l’hebdomadaire médical The Lancet.

Hospitalisations dues à la Covid-19 et surmortalité. Manaus, Brésil, 2020–21.

Une immunité collective moins élevée que celle estimée

Quatre hypothèses, non mutuellement exclusives, se dégagent. La première explication tiendrait au fait que 76 % (avec une valeur en fait comprise entre 67 % et 98%) des habitants de Manaus n’auraient pas été contaminés par le coronavirus lors de la première vague. Ce taux, avait en effet été estimé sur la base d’une prévalence des anticorps IgG anti-SARS-CoV-2 qui était de 4,8 % en avril, de 44,5 % en mai, pour atteindre un pic de 52,5 % en juin 2020.

Lewis Buss et ses collègues de l’université de São Paulo, en tenant compte des cas des sujets infectés mais sans anticorps détectables et de la baisse de l’immunité acquise au fil du temps, avaient estimé que le virus avait touché 66 % de la population de Manaus en juin et avait même atteint 76 % en octobre, un taux d’attaque bien plus élevé que celui estimé pour São Paulo et qui se situait alors à 29 %.

Quand bien même la séroprévalence aurait été dans la fourchette basse (aux alentours de 67 %) et non de 76 %, le nombre de personnes ayant été exposées au virus aurait été assez élevé pour conférer au sein de la population locale une immunité suffisante pour empêcher la survenue d’une importante flambée épidémique.

Par ailleurs, font valoir Ester Sabino et ses collègues, il est probable que la population des donneurs de sang ne s’écarte pas des paramètres démographiques de la population locale. Surtout, l’estimation de la population ayant été exposée au virus pourrait même avoir été sous-estimée dans la mesure où l’étude de séroprévalence avait exclu les donneurs de sang présentant des symptômes de Covid-19. Cette première hypothèse peut donc être a priori exclue. Une analyse des données par des équipes indépendantes pourrait néanmoins permettre de mieux appréhender à Manaus à la fois la représentativité des donneurs de sang par rapport à l’ensemble de la population locale et la dynamique du déclin de l’immunité acquise vis-à-vis du virus.

Déclin de l’immunité acquise

Seconde hypothèse : l’immunité collective avait déjà largement décliné en décembre 2020 du fait d’une baisse générale des anticorps* produits après une première infection. C’est cependant oublier que l’immunité acquise après l’infection naturelle dépend également de la persistance de lymphocytes B et T mémoires. Par ailleurs, une étude britannique conduite auprès de professionnels de santé, et ayant donné lieu à des résultats publiés dans le New England Journal of Medicine en décembre 2020 et dans la revue Clinical Infectious Diseases en janvier 2021, indique qu’une réinfection survient rarement dans les six mois suivants une première infection. Or à Manaus, la plupart des infections avaient eu lieu après un délai supérieur, en l’occurrence sept à huit mois avant l’actuelle résurgence de Covid-19. Malgré tout, cette baisse de l’immunité acquise n’explique sans doute pas à elle seule la flambée épidémique actuellement observée à Manaus.

Nouveaux variants

Troisième hypothèse : les lignées virales circulant localement pourraient échapper au système immunitaire des personnes antérieurement infectées. Deux lignages majoritaires ont été détectés à Manaus à la mi-janvier : B.1.1.7 (initialement identifié au Royaume-Uni) et P.1.

Ce variant P.1 est porteur d’une signature génétique très particulière, véritable constellation de dix mutations sur la protéine spike (spicule) de l’enveloppe du SARS-CoV-2. Il renferme notamment la mutation N501Y (comme le variant identifié en Angleterre et en Afrique du Sud) et la mutation E484K (comme le variant « sud-africain »).

Par ailleurs, un autre variant circule au Brésil et notamment à Manaus, qui renferme également la mutation E484K. Récemment baptisé P.2, celui-ci dérive du descendant du lignage B.1.1.28 (qui circule abondamment dans l’État de Rio de Janeiro et qui a probablement émergé au Brésil en février 2020). Or la mutation E484K semble être associée à un échappement immunitaire, à savoir à une moindre capacité de neutralisation par les anticorps lors de l’infection naturelle ou celle induite par la vaccination. Elle a été observée dans des isolats viraux échappant à l’activité neutralisante du sérum de patients Covid-19 convalescents. Dans certains cas, le pouvoir neutralisant des anticorps était réduit de plus de dix fois. On peut noter à ce propos que le variant P.2. a été identifié au Brésil dans deux cas de réinfection chez des patients ayant déjà présenté une infection par un SARS-CoV-2 d’une autre lignée (B.1.1.33).

Plus grande transmissibilité des virus circulants

Enfin, la quatrième hypothèse évoquée pour tenter d’expliquer la situation sanitaire très difficile à Manaus est sous-tendue par une plus forte contagiosité des lignages aujourd’hui en circulation en comparaison avec les souches qui circulaient antérieurement. Le lignage  P.1 a été détecté par les tests RT-PCR dans 13 prélèvements sur 31 collectés entre les 15 et 23 décembre 2020. Il était en revanche absent dans 26 échantillons biologiques recueillis entre mars et novembre 2020 et séquencés. À ce jour, on sait peu de choses sur la transmissibilité de ce nouveau variant. Des études de traçage et d’analyse des données épidémiologiques recueillies lors de l’actuelle seconde vague sont nécessaires pour mieux comprendre la transmissibilité de ce nouveau variant brésilien.

Selon les chercheurs, les nouvelles lignées de SARS-CoV-2 peuvent entraîner une résurgence des cas dans les endroits où elles circulent si elles ont une transmissibilité accrue par rapport aux lignées circulantes préexistantes et si elles sont associées à un échappement immunitaire. « Raison pour laquelle, ajoutent-ils, les caractéristiques génétiques, immunologiques, cliniques et épidémiologiques de ces variants du SARS-CoV-2 doivent être rapidement étudiées ». À l’inverse, « si la résurgence à Manaus est imputable à un affaiblissement de l’immunité protectrice, il faut s’attendre à des scénarios de résurgence similaires dans d’autres endroits », déclarent-ils. Dans cette autre éventualité, assurer une surveillance sérologique et génomique soutenue à Manaus, comme ailleurs, constitue une priorité, de même qu’il importe également de surveiller la survenue de réinfections par le SARS-CoV-2 et de mettre en place des mesures pour lutter contre la diffusion de l’épidémie.

Les chercheurs soulignent par ailleurs la nécessité de déterminer l’efficacité des vaccins anti-Covid-19 actuels vis-à-vis du variant brésilien P.1 et d’autres potentiellement préoccupants en termes d’échappement immunitaire. Et de conclure en proposant de procéder au séquençage des virus chez les sujets qui, au cours des essais cliniques vaccinaux, ont développé une infection au SARS-CoV-2. Selon eux, cela pourrait peut-être aider à comprendre la part que peuvent représenter les nouveaux variants dans les réinfections.

Variants et « vaccin »

Pour qui veut comprendre un peu mieux comment ça se passe, voici une explication très claire des phénomènes de biologie cellulaire impliqués.

Analyse par MARC GOZLAN dans « réalités biomédicales » d’un article scientifique (lui) publié par des chercheurs (des vrais eux) sud-africains.

Ce n’est pas très rassurant hélas

On est bien loin des prestations télévisuelles et twitteriennes de certaines et certains « infectiologues » qui se font le buzz à bon compte.

Des chercheurs sud-africains rapportent 19 janvier 2021 sur le site de prépublication bioXriv des résultats indiquant que les mutations présentes dans le variant sud-africain 501Y.V2 lui confèrent la possibilité d’échapper à l’activité neutralisante des anticorps produits lors d’une infection naturelle, voire post-vaccination.

Rappel : la protéine S (spike, spicule) de surface du coronavirus SARS-CoV-2 se lie au récepteur cellulaire ACE2. Au sein de la protéine S se trouve le domaine de liaison au récepteur : le RBD (receptor binding domain). Le RBD est la principale cible des anticorps produits lors de l’infection naturelle. Ces anticorps destinés à contrer l’infection d’autres cellules cibles par le virus sont dits neutralisants.

Structure du RBD (domaine de liaison du récepteur) du coronavirus SARS-CoV-2. Modélisation d’un complexe formé par un anticorps de classe I (vert) et de classe II (violet) [1]. Emplacement des trois mutations K417N, E484K, N501Y au sein du RBD.

Les variants du SARS-CoV-2 sont caractérisés par l’émergence de changements localisés dans la protéine S. Or la variabilité du virus à ce niveau revêt une importance cruciale dans la mesure elle définit notamment sa capacité d’échapper au système immunitaire.

Une question essentielle est donc de déterminer si les mutations accumulées par le variant sud-africain peuvent le rendre moins sensible à la réponse immunitaire humorale, celle qui dépend de l’activité neutralisante des anticorps, et donc de savoir s’il pourrait se produire un échappement immunitaire. En d’autres termes, quid du risque de réinfection et d’une perte d’efficacité, partielle ou totale, des vaccins actuels contre ce variant isolé en Afrique du Sud et dont on sait qu’il est présent en France métropolitaine (Grand-Est, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Occitanie) et en outre-mer à Mayotte ?

Structure du domaine N-terminal du SARS-CoV-2 (en bleu). En rose : anticorps neutralisant (4A8) dirigé contre la boucle N5 (N5-loop supersite).

Le RBD n’est pas la seule région reconnue par les anticorps neutralisants. Située à l’opposé du RBD dans la protéine S, le domaine N-terminal ou NTD est également une cible privilégiée. La plupart des anticorps dirigés contre le NTD reconnaissent un site, impliquant une « boucle », soit la boucle N1 (résidus 14 à 26), N3 (résidus 141 à 156) ou N5 (résidus 246 à 260).

Le variant SARS-CoV-2 récemment identifié en Afrique du Sud renferme 23 mutations dont neuf se situent dans la protéine S. Ces dernières sont classées en deux catégories. La première intéresse le NTD et se composent de quatre changements en acides aminés (substitutions L18F, D80A, D215G, R246I) et d’une délétion (perte de trois acides aminés). La seconde catégorie porte sur le RBD et consiste en trois mutations entrainant des substitutions (K417N, E484K, N501Y). La mutation N501Y, qui implique le remplacement de l’acide aminé N (asparagine) par l’acide aminé Y (tyrosine), est associée à une augmentation de la transmissibilité. La mutation E482K qui implique le remplacement de l’acide aminé E (acide glutamique) par l’acide aminé K (lysine), a été associée à une diminution de l’activité neutralisante des anticorps.

Des mutations dans ces mêmes régions de la protéine S ont été découvertes dans des variants identifiés au Brésil. D’autres variants, présentant certes un moindre risque en termes d’échappement immunitaire, ont également été identifiés au Royaume-Uni et aux États-Unis.

Les immunologistes disposent de plusieurs anticorps monoclonaux ciblant très spécifiquement une région du RBD de la protéine S. Ces anticorps sont produits par des clones particuliers de cellules B mémoire identifiés et isolés à partir des patients Covid-19. Certains d’entre eux ont été développés à des fins thérapeutiques.

Les chercheurs de l’équipe de Penny Moore du National Health Laboratory Service de Johannesburg ont évalué la capacité d’anticorps monoclonaux à neutraliser le variant sud-africain 501Y.V2. L’analyse de ces anticorps monoclonaux indiquait que leur cible était précisément le résidu K417 dans la protéine S.

Du fait que la recherche sur le SARS-CoV-2, virus pathogène respiratoire, implique de prendre d’extrêmes précautions pour les chercheurs, ceux-ci préfèrent pour leurs expériences menées en laboratoire utiliser un virus mimant le coronavirus. Pour ce faire, ils emploient un lentivirus portant la protéine S du SARS-CoV-2. On désigne ces virus artificiels, qui se comportent comme de « faux coronavirus », sous le nom de pseudovirus. Les chercheurs sud-africains ont montré que tous les anticorps capables de neutraliser efficacement le lignage originel (souche virale circulant antérieurement) ont été incapables de neutraliser les pseudovirus mimant le variant 501Y.V2, confirmant ainsi l’importance de l’acide aminé K417.

Constantinos Kurt Wibmer et ses collègues du National Institute for Communicable Diseases et de l’université de Johannesburg ont également montré l’effet de la délétion de trois acides aminés dans le NTD du variant sud-africain. Celle-ci se situe dans une région correspondant à la boucle N5. Cette délétion désorganise totalement cette zone habituellement reconnue par les anticorps neutralisants. Les résultats montrent que sa présence permet au variant 501Y.V2 de modifier la capacité de reconnaissance des anticorps et ainsi leur échapper.

Résistance aux anticorps chez la moitié des patients convalescents

Les chercheurs sud-africains ont évalué l’effet des mutations présentes dans la protéine S du variant 501Y.V2 sur leur capacité à être reconnues par l’ensemble des anticorps (polyclonaux) présents dans le sérum des patients Covid-19 convalescents, certains ayant été hospitalisés pour une forme sévère de la maladie. Il ressort que près de la moitié (21 sur 44) des sérums de ces sujets convalescents n’avait aucune activité neutralisante vis-à-vis du variant 501Y.V2. Parmi ceux-ci, trois sérums provenaient d’individus qui avaient présenté une forme sévère et avaient développé des concentrations (« titres ») élevées en anticorps. Sur les 44 sérums testés, trois présentaient une activité neutralisante réduite de 67, 77 et 86 fois par rapport au lignage originel. Seuls trois sérums renfermaient des titres élevés en anticorps contre le 501Y.V2.

Les immunologistes ont ensuite cherché à déterminer quelle(s) mutation(s) (seule ou associées) avaient entraîné cet échappement immunitaire. Pour ce faire, les chercheurs ont utilisé des virus chimériques, porteurs à leur surface d’une forme mutée du RBD de la protéine S. Une réduction substantielle de la capacité de neutralisation de ces mutants artificiels a été alors observée. Plus précisément, 27 % des sérums évalués ne présentaient aucun pouvoir neutralisant vis-à-vis des triples mutants RBD, en l’occurrence des virus chimériques porteurs des mutations K417N, E484K, N501Y présentes dans le variant 501Y.V2. Seulement 23 % de sérums testés possédaient un titre élevé en anticorps dirigés contre ces triples mutants RBD.

Ces différences en termes d’échappement immunitaire vis-à-vis du variant 501Y.V2 ou de la protéine mutante RBD soulignent l’importance des mutations se situant hors du RBD, en l’occurrence celles situées sur le NTD (domaine N-terminal), estiment les chercheurs.

Les chercheurs se sont ensuite intéressés à l’ensemble des anticorps (dit polyclonaux) développés en cas d’infection naturelle. En effet, le SARS-CoV-2 induit également des anticorps non-neutralisants. Les chercheurs sud-africains ont déterminé si le variant 501Y.V2 induisait également la production d’anticorps non-neutralisants.

Il s’avère que la plupart des patients infectés par le variant 501Y.V2 possèdent des anticorps polyclonaux reconnaissant la protéine S. Environ un tiers des sérums (14 sur 44) renfermaient un titre en anticorps cinq fois moindre que celui observé chez des patients qui avaient été infectés par le lignage originel (variant D614G), ce qui revient à dire qu’il faudrait cinq fois plus de sérum pour neutraliser la même quantité de virus.

En comparaison, trois patients avaient des titres en anticorps polyclonaux 11, 12 et 16 fois inférieurs à ceux observés en cas d’infection par la lignée virale qui circulait antérieurement.

Le variant sud-africain peut-il échapper aux vaccins ?

Reste à savoir quel rôle les anticorps non-neutralisants jouent dans la réponse à l’infection naturelle par le nouveau variant ? Peuvent-ils pallier la diminution de l’activité des anticorps neutralisants ? Interviennent-ils dans l’immunité post-vaccinale ? La question se pose dans la mesure où l’efficacité des vaccins anti-Covid-19 repose sur leur capacité à induire une réponse en anticorps dirigés contre la protéine S, et principalement sur la production d’anticorps neutralisants. Ceux-ci sont en effet constamment présentés comme les paramètres immunologiques les plus significativement associés à la protection vaccinale. Or, ces travaux montrent qu’une proportion significative d’anticorps non-neutralisants se lient au variant 501Y.V2.

De même, quid de la réponse immunitaire cellulaire vis-à-vis de ce variant isolé en Afrique du Sud ? On ignore en effet le rôle que jouent, parallèlement à l’immunité humorale, les lymphocytes T mémoire. Des études sont en cours.

Enfin, existe-t-il un risque de réinfection par le variant sud-africain ? En d’autres termes, les anticorps développés lors d’une infection récente par le SARS-CoV-2 protègent-ils contre une infection ultérieure par le variant 501Y.V2 ? Autant de questions importantes auxquelles il n’est pas possible, à ce stade des recherches conduites en laboratoire, de répondre mais que les résultats présentés par les chercheurs sud-africains soulèvent avec acuité. On peut noter à ce propos qu’un variant porteur de la mutation E484K (associé à un échappement immunitaire) a récemment été identifié au Brésil dans deux cas de réinfection. Ces patients avaient présenté une infection antérieure par un virus d’un autre lignage (B.1.1.33).

Selon les chercheurs sud-africains, une chose est sûre : « la vitesse et l’ampleur de l’échappement immunitaire vis-à-vis des anticorps neutralisants préexistants, observé avec le variant 501Y.V2, soulignent le besoin urgent de pouvoir rapidement adapter les vaccins [aux variants émergents], de même que la nécessité d’identifier dans le virus des cibles moins susceptibles de muter et pouvant servir d’antigènes vaccinaux ».

Évaluer l’activité neutralisante des anticorps vis-à-vis de nouveaux variants chez des sujets vaccinés

Il importe également de déterminer le degré de l’activité neutralisante des anticorps générés par la vaccination vis-à-vis du variant identifié en Afrique du Sud, comme d’autres variants. C’est justement ce qu’ont cherché à déterminer l’équipe de Michel Nussenzweig et Paul Bieniasz de l’université Rockefeller (New-York). Leurs résultats ont été communiqué le 19 janvier 2021 sur le site bioRxiv.

Zijun Wang et ses collègues ont effectué une étude qui a porté sur 20 volontaires ayant reçu deux doses d’un vaccin à ARN messager. Quatorze sujets avaient reçu celui de Moderna (mRNA-1273) et six autres avaient été vaccinés avec le vaccin Pfizer (BNT161b2). L’activité neutralisante des anticorps a été déterminée en utilisant de « faux coronavirus », ces pseudovirus étant artificiellement porteurs de la protéine S du SARS-CoV-2.

Trois à quatorze semaines post-vaccination, l’activité neutralisante plasmatique était similaire à celle observée dans une cohorte de patients près d’un mois et demi après l’infection naturelle mais supérieure à celle observée chez ces mêmes individus à six mois post-infection. Il n’a pas été observé de différence dans l’activité neutralisante entre les vaccins de Pfizer et de Moderna.

Les immunologistes ont évalué chez les vingt participants l’activité neutralisante des anticorps vis-à-vis de deux variants et un panel de mutations dans le RBD (K417N, E484K, N501Y). Les variants étaient celui identifié au Royaume-Uni (B1.1.7), porteur de la mutation N501Y, et le 501Y.V2, découvert en Afrique du Sud et qui renferme les trois mutations K417N, E484K et N501Y.

Les chercheurs ont observé une légère diminution de l’activité neutralisante contre certaines mutations. Cette réduction était d’un facteur de 1 à 3 vis-à-vis de la mutation E484K, d’un facteur 1,3 à 2,5 contre la mutation N501Y et de 1,1 à 3 concernant la triple combinaison de mutations K471N/E484K/N501Y. « Nous en concluons que l’activité neutralisante plasmatique générée par la vaccination à ARN messager est variable mais significativement moins efficace contre certains mutants RBD particuliers du panel testé », déclarent les auteurs.

Des anticorps représentatifs (84 au total) provenant des quatre sujets vaccinés ont été testés pour leur réactivité vis-à-vis de formes mutées de RBD. Il s’agissait donc de savoir si ces anticorps étaient ou non capables de se fixer sur ces protéines RBD porteuses de mutation(s). Globalement, les chercheurs ont observé qu’environ un quart des anticorps (26 %) ont montré une diminution d’un facteur 5 pour au moins un des mutants RBD.

Les immunologistes ont ensuite testé dix-sept des plus puissants anticorps neutralisants contre un ensemble de pseudovirus correspondant à douze variants SARS-CoV-2. Il ressort que neuf des dix-sept anticorps testés étaient au minimum dix fois moins efficaces contre des pseudovirus porteurs de la mutation K417N. Par ailleurs, cinq anticorps dirigés contre K417N et quatre spécifiques de N501Y étaient moins efficaces d’un facteur dix ou plus.

Les chercheurs ont enfin utilisé un virus mimant le SARS-Cov-2, à savoir un virus exprimant à sa surface la protéine S du coronavirus. Mis en culture, ces virus hybrides ont mis en présence de divers anticorps afin de mimer la pression exercée par le système immunitaire dans un organisme humain [2]. Le but était de déterminer si la pression imposée par les anticorps sur ces virus, répliques artificielles du SARS-CoV-2, pouvait conduire in vitro à l’émergence de mutations de résistance. Cela s’est effectivement avéré être le cas pour tous les anticorps testés.

Selon les chercheurs, leurs expériences indiquent que le variant identifié au Royaume-Uni (B.1.1.7, également appelé 501Y.V1 ou encore VOC 202012/01), de même que celui découvert en Afrique du Sud (501Y.V.2) ou encore au Brésil (B1.1.28 ou 501.V3), voire d’autres variants potentiels porteurs des mutations K417N/T, E484K/N501Y, ont la capacité de réduire le pouvoir neutralisant de sérums de sujets vaccinés. « Les effets relativement modestes des mutations sur la sensibilité du virus aux anticorps présents dans le plasma reflète la nature polyclonale des anticorps neutralisants chez le plasma des sujets vaccinés », autrement dit la variété des cibles de ces immunoglobulines. Façon de dire que l’effet modeste observé ne remet pas en question l’efficacité des vaccins actuels.

Les chercheurs ajoutent néanmoins qu’on ne sait pas quel sera l’effet à long terme de l’accumulation de mutations sur la pandémie. « Ainsi, il est possible que ces mutations, et d’autres pouvant émerger chez les personnes dont l’immunité est sous-optimale ou déclinante, éroderont l’efficacité de l’immunité engendrée par l’infection naturelle ou la vaccination », déclarent-ils. Et de conclure que leurs données indiquent que « les vaccins contre le SARS-CoV-2 pourraient avoir besoin d’être mis à jour et l’immunité devra être surveillée pour tenir compte de l’évolution du virus ».

Appel pressant à une action pan-européenne

Une correspondance publiée le 21 janvier dans The Lancet fait écho aux deux études sud-africaine et américaine citées plus haut. Ces chercheurs réclament un plan d’action pan-européen de lutte contre la propagation des nouveaux variants. Du fait d’une large circulation du virus dans des populations ayant un faible niveau d’immunité collective et de la pression de sélection évolutive du virus, « l’émergence de nouveaux variants du SARS-CoV-2 continuera, ce qui conduira à de nouveaux variants du SARS-CoV-2 potentiellement plus contagieux, et peut-être à des variants contre lesquels les vaccins actuels seront moins efficaces », déclarent les signataires.

Selon Viola Priesemann et ses collègues originaires de dix pays européens, « de tels variants pourraient aggraver la crise sanitaire, bien avant que suffisamment de personnes soient vaccinées », avant d’ajouter qu’« avant d’attendre de disposer de données expérimentales permettant de comprendre ces nouveaux variants, des décisions à l’échelon pan-européen doivent être prises et des actions entreprises immédiatement afin de limiter la diffusion de ces nouveaux variants ».

Les principales mesures préconisées consistent à parvenir à un faible nombre d’infections et à maintenir cet objectif, éviter l’importation de nouveaux variants (par la réduction des voyages intérieurs et au travers des frontières nationales, la pratique de tests et la quarantaine des voyageurs en provenance de pays étrangers), à améliorer la surveillance génomique, et augmenter rapidement le rythme des vaccinations.