Autorisation de sortie dérogatoire datant de 1720
Reprise d’un tweet de Jérémie Ferrer-Bartomeu
Ressemblant aux certificats de déplacement mis en place en 2020, ce papier présente une partie imprimée, tandis que les informations personnelles ont été complétées de façon manuscrite. A sa publication, il fait le tour du monde et est partagé sur des sites Italiens, Chinois, ou encore Arabe.
L’archive autorise un certain Alexandre Coulomb à quitter son village de Remoulins, dans le Gard où il n’y a « aucun soupçon de Mal Contagieux », pour se rendre à Blauzac, ville voisine. « Au XVIIIe siècle, on circule peu et l’on se méfie de l’étranger, surtout en période d’épidémie », raconte Jérémie Ferrer-Bartomeu. Or, en 1720, un nouvel épisode de peste, qui fera plus de 100 000 morts, ravage la population. Face à cette maladie endémique, les risques de contagion sont nombreux, et la médecine ne permet pas de soigner les malades.
« Avec ce papier, on déclare que la ville d’où vient cet homme n’est pas infectée par la maladie plus que l’homme lui-même », poursuit l’enseignant-chercheur. Il précise que l’usage de ces laissez-passer n’était toutefois pas généralisé et restait assez exceptionnel, dans le cadre de missions, et pour que le roi puisse mieux surveiller sa population dans un contexte de répression.
Le certificat indique par ailleurs qu’Alexandre Coulomb est âgé de « vingt-huit ans », est de « taille médiocre » (moyenne) et possède des « cheveux châtains ». Une manière, selon Jérémie Ferrer-Bastomeu, de pouvoir identifier les voyageurs, alors que les papiers d’identité n’existaient pas encore.
Emmanuel Lorient, le gérant de la librairie qui vendait l’archive, confie aujourd’hui ne « plus se souvenir de la provenance de ce certificat », comme il possède « plusieurs milliers de documents ». Après le message de l’enseignant-chercheur sur Twitter, l’attestation de déplacement, mise en vente en février 2019 sans grand succès, a attiré de nombreux acheteurs et a finalement été vendue pour 500 euros à une Bretonne.
- Des documents parodiques
Une seconde attestation qui circule beaucoup sur Facebook est en revanche un montage parti d’une blague.
Le 2 novembre, un internaute publie dans un groupe Facebook de parodies relatives à Napoléon Ier, « Neurchi de Napoléon Bonaparte », une fausse attestation de déplacement, censée imiter le style de l’époque.
Le faux document permettrait d’effectuer des achats de première nécessité comme du « vin » ou de la « gnôle », et autoriserait à se déplacer afin, par exemple, d’être conduit « à la guillotine ». « N’oubliez point votre document sinon c’est 25 francs-germinal d’amende », accompagne en légende le montage.
Au sein du groupe, cette publication amuse beaucoup. Mais elle est rapidement partagée ailleurs, sur d’autres pages Facebook ainsi que sur LinkedIn ou Twitter. Et de nombreux internautes prennent la publication au premier degré, la confondant avec de vrais documents de l’époque. Informé que sa photo circule désormais de façon virale, le créateur affirme en commentaire regretter d’avoir créé cette affiche, ne pensant pas que des gens pourraient y croire.
Si « cette parodie » reprend des éléments véridiques, plusieurs incohérences historiques sont identifiables. « On parle de Napoléon Ier alors que la couronne et l’aigle (présents sur le faux document) datent de Napoléon III », analyse Jérémie Ferrer-Bartomeu. « Les cases à cocher n’existaient pas non plus », poursuit l’enseignant avant de rappeler qu’au XIXe siècle, la peste avait disparu, et que c’était alors le choléra et la tuberculose qui décimaient la population.
D’autres attestations parodiques ont également fleuri sur Twitter depuis le reconfinement pour amuser les internautes. Au grand dam des historiens.