Cézallier: Le Far Centre

Evocation d’un livre magnifique d’Emmanuel Boitier (photos) et Pierre Jourde (commentaires)

« Sur les cartes de France, c’est une zone blanche, un peu comme sur les cartes du désert de la steppe. Là, il n’y a rien. Le pointillé de la frontière entre Puy-de-Dôme et Cantal traverse ce rien, aussi arbitraire que celui qui sépare Turkménistan et Ouzbékistan. Inutile d’aller visiter la Mongolie, c’est là qu’elle se trouve, en réduction, dans cette zone dont personne n’a entendu parler. Un compromis entre l’Asie centrale et le Far West : le Far Centre. »

Petit Papa Noël

Extrait du blog de JACQUES BERTHOMEAU

 » Petit Papa Noël
Quand tu descendras du ciel, prends l’escalier de service plutôt que l’ascenseur social qui est en panne depuis des plombes, pense à Gabriel Péri, à Honoré d’Estienne d’Orves, à Guy Môquet et Gilbert Dru, laisse de côté les niaiseries de Tino Rossi, avec ses petits souliers et ses jouets par milliers, sonne à ma porte quelle que soit l’heure, je t’ouvrirai, t’accueillerai, autour d’un verre de vin qui pue nous partagerons le pain et le sel, nous ne referons pas le monde car il est en si piteux état que certains pensent qu’il court à sa perte, nous avec, du moins nos enfants et nos petits-enfants, nous n’évoquerons point les points de nos retraites vu que nous sommes de vieux cons privilégiés, au troisième godet de vin nu, en nous tapant la cloche de bouts de fromages qui puent, nous commenceront à déblatérer, à dresser la liste de ceux qui pensent à notre place, de ceux qui nous pourrissent la vie, de ceux qui le cul sur leur chaise prêche la Révolution, de ceux qui mettent les doigts dans la confiture, de ceux qui ont oublié que gouverner c’est choisir, aux c’est pas de ma faute, à ce régime là nous risquons d’y passer la nuit, autour de trois heures du matin nous nous souviendrons que, petits cons, nous proclamions à pleins poumons, élections piège à cons, au petit matin nous ouvrirons une roteuse pour accompagner un bout de brioche, comme tu n’as pas d’âge tu égrèneras tes souvenirs de toutes les guerres qui devaient être la der des der, et puis, même si les cocos ont trahi, de Budapest à la Tchécoslovaquie en passant par le mur de Berlin et le Goulag, nous évoquerons l’Aragon de la Résistance :

Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Tous deux adoraient la belle
Prisonnière des soldats
Lequel montait à l’échelle
Et lequel guettait en bas
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Qu’importe comment s’appelle
Cette clarté sur leur pas
Que l’un fût de la chapelle
Et l’autre s’y dérobât
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Tous les deux étaient fidèles
Des lèvres du cœur des bras
Et tous les deux disaient qu’elle
Vive et qui vivra verra
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Quand les blés sont sous la grêle
Fou qui fait le délicat
Fou qui songe à ses querelles
Au cœur du commun combat
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Du haut de la citadelle
La sentinelle tira
Par deux fois et l’un chancelle
L’autre tombe qui mourra
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Ils sont en prison Lequel
A le plus triste grabat
Lequel plus que l’autre gèle
Lequel préfère les rats
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Un rebelle est un rebelle
Nos sanglots font un seul glas
Et quand vient l’aube cruelle
Passent de vie à trépas
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Répétant le nom de celle
Qu’aucun des deux ne trompa
Et leur sang rouge ruisselle
Même couleur même éclat
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Il coule il coule il se mêle
A la terre qu’il aima
Pour qu’à la saison nouvelle
Mûrisse un raisin muscat
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
L’un court et l’autre a des ailes
De Bretagne ou du Jura
Et framboise ou mirabelle
Le grillon rechantera
Dites flûte ou violoncelle
Le double amour qui brûla
L’alouette et l’hirondelle
La rose et le réséda

Louis Aragon, « La Rose et le Réséda » « 

Eric Fottorino

« Tant de gens sont fragiles, tant d’autres ont la dureté des cailloux, et il faudrait que tout cela s’accorde pour la vie.  » (Caresse de rouge)

« Le petit aime beaucoup écouter les grandes personnes. C’est ainsi que sa vie est un malentendu. L’autre jour, Lina parlait à un inconnu devant le bâtiment Z : « Mon fils est un enfant d’août », expliquait elle. Le petit a saisi « un enfant doux », mais l’homme a repris Lina en prononçant le « t » final de ceux qui ont l’accent du Sud-Ouest. Il a dit août avec le « t » cogné contre les dents et le petit s’est métamorphosé en « enfant doute ». D’un seul coup, la douceur de sa naissance a disparu et c’est ainsi qu’il s’est enfoncé dans le malentendu qui va bien avec les secrets.  » (Korsakov)

« Ce sont les mots qu’ils n’ont pas dits qui font les morts si lourds dans leur cercueil.  Montherlant. »
(L’homme qui m’aimait tout bas)

Frederic Larrey et Yves Fagnart

On  a fait moins de battage médiatique que pour Munier Tesson, mais leur oeuvre sur le même sujet est incontournable  🙂   

Photos et video du blog n’apparaissent pas sur les mails de notification

Les images de Frédéric Larrey, capturées dans les hautes montagnes du Tibet, témoignent des rencontres entre le photographe et les mythiques panthères des neiges.
Surnommée le fantôme des montagnes, le félin a la réputation d’être un animal extrêmement discret et insaisissable. Les panthères des neiges vivent sur le haut plateau de l’Himalaya. Longtemps braconnées, elles sont devenues très rares et il en reste à peine quelques milliers dans le monde.
Frederic LARREY, photographe et naturaliste a pu rencontrer cet animal mythique dans les montagnes Tibétaines.

 

Yves Fagniart pratique l’art naturaliste depuis plusieurs années. Son mode d’expression favori est l’aquarelle. L’originalité de ce peintre réside dans son approche de terrain et sa transcription des ambiances dans la nature. Ses aquarelles sont un alliage de lumière et d’atmosphère où l’animal et le biotope ont autant d’importance. Depuis plus de 15 ans, il sillonne et répertorie divers espaces naturels en Europe et en Afrique. Ses Œuvres sont reconnues internationalement et sont exposées régulièrement dans différents pays. Elles sont la reconnaissance de son engagement et de son travail, car son parcours est bien à l’image de sa personnalité et de sa démarche pour la protection de l’environnement : « originale et engagée ».

Glyphosate (suite)

En complément à l’article précédent, quelques mots sur le labo Biocheck:

Un laboratoire militant
Le profil du laboratoire allemand aurait dû, lui aussi, éveiller les soupçons, sinon ceux des Français inquiets qui se sont fait tester, du moins des journalistes qui ont relayé leurs résultats : situé à Leipzig, ce laboratoire spécialisé dans le diagnostic vétérinaire a été cofondé en 1997 par Monika Krüger. Aujourd’hui retraitée, elle est une militante connue de la cause antiglyphosate et milite pour son interdiction depuis des années. Ardente partisane de l’agriculture biologique, elle a fait de son laboratoire une base référente des opposants à Monsanto et à son herbicide. Lorsqu’ils ont été vérifiés, par le passé, par les autorités allemandes, les résultats alarmants de BioCheck ont d’ailleurs été invalidés. La société américaine Abraxis, à l’origine de la méthode Elisa utilisée par BioCheck, a dû d’ailleurs se défendre en précisant que « les résultats positifs nécessitant une action réglementaire devraient être confirmés par une autre méthode », raison pour laquelle les tests Elisa ne sont pas reconnus par les agences sanitaires.

Tests du glyphosate

Depuis les clameurs indignées qui ont suivies les fameux tests dans les urines, connaissant un peu la question et en particulier ce qu’est le métabolisme du glyphosate, je dis mon scepticisme sur la valeur de ces tests…
Cette publication du Point est éclairante.
Mais…ne prouve rien non plus, en faveur de la molécule.
Nous vivons une époque moderne!  🙂  « 

On a maintenant la réponse : rien. Du vent.
Excédés par l’hostilité grandissante de leur voisinage chauffé à blanc par ces campagnes médiatiques mettant en cause leurs pratiques, les responsables de la FDSEA du Finistère ont rassemblé onze personnes (dix agriculteurs et un riverain) et fait réaliser, sous contrôle d’huissier, une analyse croisée de leurs urines. Le 7 novembre, les cobayes ont prélevé simultanément deux échantillons des urines du matin, qui ont été envoyés, par huissier et selon le protocole exigé, l’un au laboratoire allemand BioCheck, situé à Leipzig et qui a réalisé l’ensemble des analyses des « pisseurs volontaires », l’autre au laboratoire Labocea de Brest, un laboratoire public dont le service des micropolluants organiques est accrédité par le Cofrac (Comité français d’accréditation), gage de rigueur scientifique.
Deux méthodes d’analyse différentes
Avant de sonder les résultats, il faut le préciser : le laboratoire vétérinaire allemand BioCheck utilise la méthode d’analyse immuno-enzymatique Elisa. Rapide et peu coûteuse, « elle est conçue à l’origine pour des tests dans l’eau pure », explique Nicolas Venisse, responsable du service de toxicologie et pharmacocinétique du CHU de Poitiers, auquel Le Point a soumis les résultats. « On utilise un anticorps spécifique au glyphosate, capable de repérer une structure similaire, de la reconnaître et de se fixer dessus. Mais la spécificité de ces anticorps est imparfaite, et il arrive souvent qu’ils se fixent sur une structure proche. » Même s’ils avaient été adaptés pour des analyses d’urine, les kits utilisés par BioChecks, fournis par la société américaine Abraxis, « ont une fiabilité limitée », car l’urine est complexe et contient une foule de molécules à la structure proche de l’anticorps utilisé et susceptibles de provoquer une réaction, d’où un risque élevé de « faux positifs ».

À l’inverse, le laboratoire Labocea, dûment accrédité et qui exerce une mission de service public, utilise une technique d’analyse par chromatographie couplée à la spectrométrie de masse, qui permet de séparer, d’identifier et de quantifier précisément chaque molécule d’un mélange complexe. « Cette méthode LC-MS/MS est sans conteste la méthode de référence », précise Nicolas Venisse. « La partie chromatographique permet d’abord de séparer les éléments, puis la spectrométrie de masse détecte chacun en se basant sur la masse du composé. C’est la technique qui a la plus grande fiabilité, et un seuil beaucoup plus fin de détection. » C’est la raison pour laquelle, d’ailleurs, puisqu’elle est plus fiable, elle est aussi plus chère que la méthode Elisa : le laboratoire BioCheck facture seulement 75 euros le test à ses clients. Selon le protocole du laboratoire consulté par Le Point, il suffit d’uriner dans un pot, de faire « bouillir l’échantillon 10 minutes » dans une casserole (nul besoin de le congeler) et de l’envoyer sous pli postal au laboratoire allemand. Un laboratoire français agréé exige une congélation de l’échantillon et une ordonnance pour réaliser l’analyse.
Les résultats des onze cobayes sont donc les suivants : alors que le laboratoire allemand a trouvé des traces de glyphosate dans tous les échantillons présentés, avec des taux variant de 0,44 à 2,97 microgrammes par litre, le laboratoire français n’a rien trouvé du tout : les traces sont si faibles qu’elles sont non détectables, soit en dessous de 0,05 microgramme par litre. »

 

Blagounettes

Les fameux courriers véridiques adressés à la Sécu (compilés par Axelle Cartier dont le prochain livre sortira sous peu) 

-Je déclare sur l’honneur vivre seul avec une tierce personne.
-Chère Sécurité sociale,
Depuis que le médecin a dit à mon mari de prendre de la courtisane, il va beaucoup mieux.
-Madame, Monsieur,
Etant décédé, je vous joins mon certificat de décès, et reste à votre disposition si vous souhaitez des informations sur le décès.
-J’en ai marre de bosser pour tous les gens qui foutent rien, mon voisin est en arrêt maladie alors qu’il n’est pas malade, je viens de le croiser à Carrefour.
-Pour le traitement informatique des formulaires, votre sexe ne doit pas dépasser de la colonne.
-Nous vous informons que suite à des événements tragiques, nous fermerons l’accueil de 11h45 à 13h15 afin de procéder à 1 minute de silence.
-Je n’ai pas de ressources à déclarer pour mon dossier CMU, je vis de gauche à droite, mais toujours dans le droit chemin.
🙂

 

Julien Royer

Le Cantalien Julien Royer, chef du restaurant Odette à Singapour a terminé 1er d’un concours qui a primé, le 26 mars, les 50 meilleurs restaurants d’Asie. Une reconnaissance mondiale pour sa cuisine française aux influences asiatiques.

Aujourd’hui âgé de 36 ans, ce natif de Riom-ès-Montagnes a fait ses études à l’école de Chamalières, près de Clermont-Ferrand. Ancien élève de Michel Bras en France, il a ensuite parcouru le monde dans les cuisines d’Antonin Bonnet à Londres, puis il est parti à Bora-Bora et à Singapour. En novembre 2015, il s’est lancé et a ouvert son propre restaurant.

« Odette, c’est le prénom de notre grand-mère maternelle. C’est elle qui lui a donné le goût et la passion de la cuisine. Il tenait à lui rendre hommage » explique sa sœur. Puis elle ajoute : « Il offre à tous ses clients un petit pot de confiture dans un coffret à l’effigie du restaurant. Il adorait la confiture de groseilles qu’elle faisait avec les fruits que nous venions de ramasser. Il a revisité sa recette et maintenant il l’a fait partager ».
🙂

Raymond Carver

Pour moi, c’est surtout  un superbe poète que peu de gens connaissent.
Quelques morceaux choisis:

« La lucidité, ça n’a jamais fait de bien à personne. Ça rend la vie encore plus difficile. »

« Fais ça pour moi ce matin.
Tire le rideau et reviens te coucher.
Laisse tomber le café.
On va faire semblant d’être à l’étranger et amoureux.  »

« J’ai examiné la chambre il y a quelques instants
et voilà ce que j’ai vu-
mon fauteuil à sa place, près de la fenêtre,
le livre ouvert retourné sur la table.
Et sur le rebord, la cigarette
en train de se consumer dans le cendrier.
Simulateur ! c’est ce que m’avait dit mon oncle
autrefois. Il avait raison.
J’ai mis de côté du temps, aujourd’hui,
comme tous les jours,
pour ne rien faire du tout.  »

« Les yeux de l’enfant s’étaient ouverts puis refermés. Ils se rouvrirent. Les yeux regardèrent droit devant eux une minute, puis pivotèrent lentement, se posèrent sur Howard et Ann, puis se détournèrent.
— Scotty, dit sa mère, s’approchant du lit.
— Hé, Scott, dit son père. Hé, fiston.
Ils se penchèrent sur le lit. Howard prit la main de l’enfant dans les siennes et se mit à la tapoter et à la serrer doucement. Ann se pencha et couvrit de baisers le front de son fils. Elle lui prit le visage entre ses mains.
— Scotty, mon chéri, c’est Maman et Papa. Scotty ?
L’enfant les regarda, mais sans les reconnaître. Puis sa bouche s’ouvrit, ses yeux se fermèrent, et il hurla jusqu’à ce qu’il n’eût plus qu’un souffle d’air dans les poumons. Alors son visage se détendit et s’adoucit. Ses lèvres s’écartèrent comme son dernier soupir remontait dans sa gorge et s’exhalait doucement à travers ses dents serrées.
Les docteurs appelèrent ça une occlusion cachée, disant qu’ils en voyaient un cas sur un million. S’ils avaient diagnostiqué son état et opéré immédiatement, peut-être qu’ils auraient pu le sauver. Mais c’était improbable. »

« Ce matin était bien. un peu de neige tapissait le sol. Le soleil flottait dans un ciel clair et bleu. La mer était bleue et bleu-vert, aussi loin que portait l’œil. À peine une ondulation. Calme. Je me suis habillé pour aller me promener – résolu à ne pas rentrer avant d’avoir recueilli ce que la Nature avait à m’offrir. J’ai dépassé de vieux arbres inclinés. Traversé un champ semé de rochers où la neige s’était entassée. Marché jusqu’à atteindre une falaise. Où j’ai contemplé la mer, et le ciel, et les mouettes tournoyant au-dessus de la plage blanche loin au-dessous. Tout était beau. Tout baignait dans une pure et froide lumière. Mais, comme toujours, mes pensées se sont mises à errer. Je devais me contraindre à voir ce que je voyais et rien d’autre. Je devais me dire c’est cela qui compte, pas autre chose. (Et je l’ai vraiment vue une ou deux minutes !) Un ou deux minutes elle a refoulé les rêveries habituelles sur ce qui est bien, et ce qui est mal – le devoir, les bons souvenirs, les idées de mort, la façon de me conduire avec mon ex-femme. Toutes ces choses dont j’espérais qu’elles disparaîtraient ce matin. Ce avec quoi je vis chaque jour. Ce que j’ai foulé aux pieds afin de rester en vie. Mais une ou deux minutes j’ai bel et bien oublié moi-même et tout le reste. Je le sais. Car quand j’ai fait demi-tour je ne savais plus où j’étais. Jusqu’à ce que des oiseaux s’échappent des arbres noueux. Et s’envolent dans la direction que je devais prendre. «